mercredi 1 février 2012

Quand l'auto se prend pour Nespresso

La Peugeot 208 sera moins chère que la 207 qui la précède © Automobiles Peugeot


La TVA sociale, si elle est appliquée un jour, n’y devrait rien changer. Il est inutile de se précipiter chez son garagiste avant le mois d’octobre pour s’offrir une nouvelle auto, car son prix ne devrait pas grimper. Il pourrait même diminuer encore. Phénomène étrange : à l’époque où tout augmente, le tarif des voitures baisse depuis six ans. Du moins augmente-t-il moins vite que les prix à la consommation. Si ces derniers ont grimpé de 9,8%, ceux de nos autos n’ont subi qu’une hausse de 8%, alors qu’elles sont plus grandes, mieux équipées et plus sécurisées qu’avant. Et encore, s’agit-il du prix affiché. Or plus personne n’achète sa monture au tarif « catalogue ». Pas un modèle n’est vendu sans promo, ristourne ou rabais exceptionnellement permanent. L’année 2011 a systématisé ce type d’offres et les réseaux Citroën ont vendu certains modèles de C3 flambant neuves avec des réductions de -32%. Mieux, chez Renault, la Clio s’est bradée à -46%. Difficile après ce type d’opérations de revenir en arrière. D'autant que les chiffres de ventes de ce mois de janvier sont tombés et affichent un cataclysmique -20,7%. Une situation que Peugeot a parfaitement anticipée. Sa nouvelle 208, qui va débouler dans les concessions dans deux petits mois sera venu à un prix annoncé (et hors promo) moins chère que le modèle qu’elle remplace, la 207. Une première.
Des appareils pas chers et des consommables hors de prix 
Va-t-on devoir faire la manche pour renflouer des constructeurs mécènes qui vendent à perte leurs modèles pour soutenir la consommation? Inutile. Car en croisant deux simples chiffres, on s’aperçoit que les marques françaises comme étrangères s’adonnent au culte de Nespresso ou des vendeurs de phocopieurs et sont en train de modifier leur modèle économique en conséquence. Chez Nestlé, ou HP, on a trouvé un truc simple et efficace. Les appareils sont vendus peu chers, mais les consommables (capsules et cartouches d’encre) sont hors de prix. L’acheteur est ravi de faire une bonne opération au moment de s’offrir sa cafetière ou son copieur. Mais il déchante en commandant son café et ses cartouches d’encre.

Ailes de voitures et capsules Nespresso, même combat 
Dans le secteur automobile, c’est pareil. Entre 2005 et 2011, au moment même ou le prix des voitures neuves a baissé, ou stagné, le prix des pièces détachées a explosé de 30,5%, selon l’association SRA (Sécurité et réparation automobile), un observatoire qui regroupe les compagnies d’assurances. Une hausse trois fois supérieure que les prix à la consommation constatés à la même période. On le voit, les constructeurs ont transféré leurs marges perdues sur les ventes de voitures, sur celles des pièces détachées. Du coup, on comprend beaucoup mieux le lobbying forcené qu’ils tentent, avec bonheur, pour éviter l’arrivée de pièces fabriquées et vendues par d’autres fournisseurs qu’eux-même et leurs sous-traitants. De la même manière, ils résistent à l’application stricto sensu d’une directive européenne de 2002, permettant à n’importe quel garagiste indépendant de réparer n’importe quelle auto de n’importe quelle marque. Cette réticence à se conformer aux lois permet de contrôler parfaitement le marché de la réparation puisque, toujours selon le SRA, 50% des autos de moins de deux ans, sont entretenues dans le réseau du constructeur d’où elles proviennent. Pour éviter que les indépendants s’en mêlent, les marques usent de stratagèmes simples comme la rétention d’informations techniques, ou la difficulté d’accès aux logiciels spécialisés, conçus pour un type de modèle particulier.

L’Autorité de la concurrence sur les dents 
Devant cette entourloupe, l’Autorité de la concurrence s’en mêle. Elle suspecte une « insuffisance de la concurrence » et devrait rendre son verdict début mars. Evidemment, les juristes de Renault ou PSA sont sur l’affaire et nul doute que la parade est d’ores et déjà dans leur attaché-case. Et même s’ils ne trouvent pas la faille judiciaire dans le texte de l’Autorité, on peut parier que le nouveau modèle économique de l’automobile ne sera pas menacé. Car la baisse des ventes attendues en France en 2012, et les menaces sur l’emploi de la filière fourniront suffisamment d’arguments au secteur pour qu’il conserve son monopole sur l’entretien de ses autos. Et puisse clamer, au mois d’octobre que la hausse de 1,6% de la TVA ne passera pas par lui. Du moins pas par ses voitures.

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