lundi 19 décembre 2011

Saab victime de la guerre sino-américaine

Saab 9-4X, l'ultime voiture de la marque ©Saab automotive
 
Voilà, c’est fini. Après deux ans d’agonie, le constructeur suédois Saab serre définitivement le frein à main et claque la portière. La marque s’est déclarée en faillite auprès du tribunal de Vänersborg. Totalement insolvable, l’entreprise a prévenu ses fournisseurs qu’ils n’avaient plus qu’à sonner à la porte de l’administration suédoise pour qu'ils tentent de se faire régler leurs dernières factures.

Et pourtant, deux groupes chinois, Youngman et Panda se tenaient prêts à injecter des liquidités dans l’affaire. Et s’ils ne l’ont pas fait, c’est parce que General Motors s’y est opposé. De quel droit ? Le géant américain n’est plus propriétaire de la marque puisqu’il l’a cédé en 2009 à un entrepreneur néerlandais et aventurier. Sauf que les voitures que le Suédois continuait à sortir au compte-gouttes de ses chaînes de Tröllhattan étaient des voitures GM très bien maquillées certes, mais ultra proches des Cadillac et Opel, propriétés elles aussi de General Motors. Et ce qui intéressait en premier lieu le constructeur et le distributeur chinois prêts à racheter la maison, ce n’était ni la flamboyante marque suédoise, ni la petite usine scandinave qui emploie toujours 3700 personnes. Mais bel et bien les brevets qui se cachent sous les capots des Saab-Opel-Cadillac. Que le transfert technologique figure sur le bon de commande, était une condition absolue pour que les chinois mettent la main à la poche. Le géant américain a donc refusé.

Licencier 6000 personnes tout de suite ou 12000 plus tard ?
Évidemment, la décision de GM est lourde de conséquence pour le personnel de Saab, les équipementiers et les filiales étrangères. Ce qui représente près de 6000 personnes qui devraient se retrouver très vite au chômage. Même s’ils se raccrochent à l’infime espoir de voir débarquer un repreneur zorro, susceptible de renflouer la boutique sans quémander le moindre brevet. Et donc sans avoir la possibilité de fabriquer de nouvelles voitures, sauf s’il les crée de toutes pièces. Mais la décision du groupe américain n’a pas dû être très longue à prendre. Le nouveau carrosse suédois, le 4X4 Saab 9-4X, qui intéressait particulièrement les Chinois et devait débarquer chez nous au tout début de l’année prochaine, est fabriqué au Mexique, dans la même usine et sur la même chaîne que son cousin le Cadillac SRX. Logique, puisqu’il s’agit d’une seule et même auto. Cette Cadillac est l’un des fleurons de GM et la meilleure vente de la marque aux US. On imagine donc assez mal les dirigeants de GM acceptant de livrer aux acheteurs asiatiques, le mode d’emploi complet pour fabriquer son best-seller, sans aucun recours de plagiat possible, puisque le transfert aurait été accepté et acté. Les financiers de Detroit ont donc sorti leur calculette pour comparer et trancher. D’un côté leur usine mexicaine, presque la banlieue américaine, ses 12000 salariés et les milliers de garagistes Cadillac à travers les Etats-Unis. De l’autre côté, à 9000 kms de là, une usine de 3 700 personnes, dans une ville, Tröllhatan, au nom imprononçable pour un cadre du Michigan. Leur choix fut aisé et les victimes suédoises sont celles d’une guerre que se livrent, et que n’ont pas finies de se livrer, les groupes occidentaux et chinois. Une guerre du protectionnisme qui fait des victimes : les pays qui n’ont pas pu, ou voulu, en leur temps, conserver leur outil industriel. C’est justement le cas de la Suède, puisque l’autre et seul constructeur national a été vendu en 2010. A un autre groupe Chinois.

mercredi 14 décembre 2011

Sarkozy fustige les délocalisations automobiles qu'il a entériné

Renault Latitude, une coréenne rebadgée ©Renault

Il a beau jeu de prendre la voiture pour cible. Mais Nicolas Sarkozy s’est quelque peu fourvoyé, mardi à Sallanches, en taclant l’automobile française. Car si la désindustrialisation est une réalité française, prendre pour exemple les constructeurs hexagonaux, revient à caillasser l’une des très rare production de produits manufacturiers de l’hexagone. Parce que, même si ses jours sont comptés, la filière emploie bon an mal près de 700 000 salariés. Parce que nombre de modèles sont toujours fabriqués (du moins assemblés) du côté de chez nous. Et surtout parce que, si mauvais élève délocalisateur il y a (car il y en a un), c’est justement celui dont l’Etat est actionnaire à hauteur de 15, 01% et qu’il siège au conseil d’administration de Renault ou sont entérinés toutes les décisions stratégiques.  Il en est même un partenaire de poids puisqu’il détient la plus forte participation, légèrement plus importante que celle de Nissan. De quoi peser sur le choix d’un site industriel, comme celui de Palencia, en Espagne où est fabriquée la gamme Mégane, les voitures les plus vendues en France au mois de novembre dernier. On pourra rétorquer que la recherche et le développement de ces modèles et de leurs motorisations est belle et bien française. Mais qui sont les ingénieurs qui se sont penché sur le Koleos, le 4x4 du losange, ou sur la nouvelle berline Latitude, haut de gamme revendiquée de la marque ? Ces deux modèles ne sont que des voitures coréennes rebadgées de la marque Samsung, propriété du groupe. Seuls quelques designers hexagonaux se sont donc approchés de leur calandre pour leur donner une allure maison.

Des 4x4 coréens et japonais rebadgés
Ironie du sort, c’est aujourd’hui PSA qu’on attaque pour ses délocalisations avérées et programmées, évidemment liés aux 5 000 suspensions de poste annoncés par son PDG Philippe Varin. Or si Peugeot et Citroën s’adonnent volontiers au sport de l’off shore, les deux marques le pratiquent légèrement moins que leur concurrent, du moins pour le moment. La petite C3, qui figure dans le Top 10 des ventes françaises est fabriquée à Poissy et à Aulnay Sous Bois. Et si l’on peut avoir de sérieux doutes sur l’avenir de cette dernière usine, en grève ce jeudi, elle n’en a pas moins fabriqué 195 500 citadines Citroën made in 93, rien que l’an passé. La 308, voiture compacte de Peugeot, sort quant à elle des usines de Sochaux. Evidemment, PSA ne résiste pas à l’appel du large. Et use lui aussi de la méthode Renault qui consiste à reprendre à son compte les autos (étrangères) des autres. C’est le cas du 4x4 japonais Mitsubishi Outlander, devenu, par la grâce de la multiplication des marques, C-Crosser chez Citroën et 4007 chez Peugeot.

Des délocalisations entérinées par l'Etat
Pas question, du coup de dédouaner PSA, largement titillé par une grosse envie d’aller produire ailleurs pour moins cher. Et qui ne devrait pas tarder à passer à l’acte un peu plus encore, sans que l’Etat n’y puisse grand chose. Il est simplement curieux de noter la mauvaise foi, ou du moins l’oubli de quelques réalités, d’un président de la République qui met en cause des délocalisations engagées par une entreprise (Renault, en l’occurrence) sur les décisions de laquelle il peut peser. Et qu’il a, par voie de conséquence, entériné.

mardi 6 décembre 2011

l'Autolib' c'est bien, surtout là ou l'on n'en a pas besoin

La voiture self-service du groupe Bolloré ©DR
 
La belle idée que voilà. Une voiture silencieuse, facile à conduire, qui ne pollue pas, que l’on emprunte juste le temps qu'il faut et aussi facilement qu’un chariot de supermarché, ce qui coûte moins cher qu’une voiture personnelle. On l’attendait et l'Autolib’ est arrivée. Sauf que le déploiement prévu (3000 autos électriques dans 750 stations) n’est pas vraiment là où on l’attendait, justement. Une fois encore (une fois de plus ?) l’inextricable pelote des transports en région parisienne est démêlée à l’envers. Et pour plusieurs raisons.

Autolib’ se concentre trop sur la capitale
On le sait, Paris intra-muros est l’une des capitales mondiales les mieux desservies en matière de transports en commun. Pas en qualité certes, mais en quantité sûrement. La règle imposée par Fulgence Bienvenüe et ses successeurs planificateurs de lignes est toujours d’actualité : il est quasi impossible d'arpenter plus de 800 mètres de la capitale sans rencontrer une bouche de métro. De plus, un déplacement souterrain à travers la ville ne nécessite pas plus de deux correspondances. Un système que les métros new-yorkais, moscovites ou londoniens nous ont toujours enviés. Le problème est ailleurs, en banlieue, précisément. Et surtout dans les déplacements entre ces villes qui entourent Paris. Et qui, depuis longtemps, ne passent plus par la capitale. On vit dans une banlieue, on travaille dans une autre, et l’on se divertit dans une troisième. Or, comment se répartissent les stations Autolib' ? Ou plutôt comment vont-elles se répartir lorsque elles seront toutes construites ? Paris en comportera 528. Et toute la banlieue, du moins les 46 communes qui ont accepté de recevoir les autos du groupe Bolloré, se contenteront des 222 restantes. C’est peu là où il en faudrait beaucoup. Et c’est beaucoup là ou il en faudrait moins. L’archi-saturation de l’A86, de l’A104 et des principaux axes autour de Paris n’est donc pas prête d’être résorbée. Quant à Paris intra-muros, les bouchons ne risquent pas d’y être réduits là non plus. Surtout si les habitants de la capitale délaissent les transports en commun pour les Autolib’. Certes, celles-ci ne pollueront pas, mais les voitures qui les entourent produiront plus de C02 et de particules de gazole, puisqu’un afflux de nouveaux véhicules provoqueront forcément des encombrements supplémentaires.

Autolib' ne prête qu’aux riches
Et puis, en examinant la carte d’Ile de France qui indique les actuelles et futures stations Autolib, on se rend compte d’un choix social évident. L’Ouest et le Sud-ouest de Paris sont privilégiés, ainsi que l’enclave chic du Sud-Est (Saint Mandé, Saint Maurice). Pour les villes plus populaires du 93 ou 95, on repassera. Si l’on n’a pas la chance de résider à Drancy, ou Romainville, quelques unes parmi les rares exceptions à cette règle du CSP+. Tous ceux de Bondy, Bobigny, Sevran ou Aulnay sous Bois continueront allègrement de polluer et d'embouteiller leur riante banlieue et ses autoroutes A1 et A3.

Autolib' n’aime pas les zones industrielles
On nous rétorquera, avec raison, que le système Autolib’ n’est pas prévu pour les déplacements quotidiens domicile-bureau. Un cas de figure ou la location s’avère beaucoup trop chère. Certes. Mais n’est-il pas destiné, au delà des loisirs, à être utilisé de manière professionnelle occasionnelle, histoire d’honorer ses rendez-vous dans les lointaines banlieues ? Or, l’activité se concentre dans de grandes zones industrielles comme celles de Marne La Vallée, ou aucune station n’est prévue, ou, à l’opposé, à Saint Quentin en Yvelines, ou l’on n’aperçoit pas non plus le bout d’un capot d’Autolib’.

Autolib’ est aux prises avec les bisbilles politiques
Evidemment, ces discriminations ne sont pas toutes volontaires. Même si la logique du groupe Bolloré qui compte rentabiliser ses lourds investissements paraît claire. Mais elles résultent, comme souvent, de mésententes politiques qui ne sont pas forcément liées à un clivage gauche – droite. Si Bertrand Delanoë a porté le projet à bout de bras avec l’industriel, comme il le fit en son temps pour le Vélib avec le groupe Decaux, il n’a pas toujours été suivi par les élus socialistes de la région, ni même par sa propre majorité à la Mairie de Paris. Les conseillers municipaux verts de la capitale s’y sont opposés et Dominique Voynet, maire de Montreuil, a bouté les autos électriques hors de sa ville. Autant de bisbilles qui font aujourd’hui du tort à la juste répartition des stations. Et qui est en train de transformer une bonne idée en fausse bonne idée.

mardi 29 novembre 2011

Les voitures chinoises ont un pneu dans l'Europe


La Geely Emgrand EC7, berline chinoise quatre étoiles © Geely


Aucun constructeur européen n’a envie de voir débouler sur son marché des autos chinoises grandes, confortables, sobres, suréquipées et vendues au prix d’un modèle low-cost basique. Pourtant, les portières de l’Europe jusqu’ici bloquées vont très vite s’ouvrir à elles. Et les air-bags des homologations obligatoires pour circuler dans l’Union ne protègeront plus très longtemps nos marques de leurs rivales extrêmes orientales. Car leur manque de sécurité, ultime argument invoqué jusqu’ici pour les empêcher de circuler sur le vieux continent, vient d’être battu en brèche. Grâce, ou à cause, de l’EuroNcap

Deux chinoises quatre étoiles  
Cet organisme européen indépendant, qui procède régulièrement à des tests et note les voitures que lui soumettent les constructeurs, vient de délivrer à deux modèles chinois la note de quatre étoiles sur son échelle de cinq. Un barème qui ne signifie nullement que la Geely Emgrand EC7, une berline née dans la province de Zhejiang, et la MG6 conçue à Shanghai vont débouler sur nos routes tout de suite. Parce que l’EuroNcap ne peut leur donner le visa d’homologation indispensable à la vente en série.

Des tests indépendants plus sévères que les officiels
Mais cette (bonne) note marque très certainement la fin des tracas que connaissaient les constructeurs de la République populaire jusqu’ici. Parce que les notes que ces autos ont récoltées sont similaires à celles qu’ont décrochées les Fiat Panda, Jaguar XF et Renault Fluence ZE. Trois voitures qui circulent déjà, et en toute légalité, bien sûr. Et Parce que les tests réalisés dans les labos de l’EuroNcap sont, pour certains d’entre eux, plus sévères que ceux qui sont utilisés pour la mise en conformité d’un véhicule par l'European Enhanced Safety Vehicle Committee (EEVC) qui délivre le permis de circuler. Pour le crash-test frontal, par exemple, la vitesse retenue par le labo indépendant est fixé à 64 km/h, soit 8 km/h de plus que le test officiel. Devant cette évidence, et ces quatre étoiles, les techniciens chargés d’homologuer les autos avant leur mise sur le marché devront bien céder.

Le gouvernement chinois encourage les constructeurs locaux
C’est donc une lutte de plus de cinq ans qui est en train de s’achever, sur une victoire chinoise. Et, devant la puissance économique de ce pays, on est même en droit de se demander comment elle a pu durer aussi longtemps. « Tout simplement parce que les constructeurs chinois ne s’intéressaient pas plus que ça à l’Europe, trop occupés qu’ils étaient avec leur marché local ». C’est Elizabeth Young qui le dit. Et elle sait de quoi elle parle. PDG d’Asie Auto, société française importatrice de voitures chinoises, elle se tient prête, et dispose déjà d’un réseau de 140 concessionnaires répartis sur tout le territoire. « C’est le gouvernement qui a pris les devants pour aider les constructeurs».  Un gouvernement qui a recréé sur place un labo de tests naturellement rebaptisé C-Ncap. Il a repris point par point les tests de son homologue européen et a invité les marques locales à crasher leurs modèles pour les préparer au bain européen. Ce qui fut fait, avec succès.

Des voitures à moitié prix
Le compte à rebours de l’homologation est donc entamé, reste à savoir si le succès sera au rendez-vous. L’image des produits made in China n’est pas au mieux. Et en matière d’automobile, la notion de sécurité est plus essentielle que pour un jouet ou un smartphone. Mais on l’a vu, dans ce dernier domaine, les deux modèles chinois font jeu égal avec Renault, Fiat et Jaguar. Et puis, il y a quelques éléments tous droits sortis de la fiche technique de la Geely Emgrand EC7. Un moteur de 138 CV, des équipements comme s’il en pleuvait, quatre air-bags, une taille de Renault Laguna, et un prix, estimé, de 12600 euros. Combien coûte la Laguna rivale de puissance identique ? 24800 euros.


mercredi 23 novembre 2011

Des nids de poule sur la route de la Renault à 2500 euros


Dacia Logan. La low cost, en attendant l'ultra low cost ? © Renault Media


Concevoir et produire une Renault (neuve) pour 2500 euros. C’est le cahier des charges, très simple, qui serait confié, selon La Tribune à Gérard Detourbet dès le 1er janvier 2012. Une auto ultra low cost qui devrait être produite en Inde pour le marché local et pour d’autres pays émergents. Totalement inconnu du grand public, l’homme a pourtant révolutionné l’industrie automobile. Car il est à l’origine du phénomène Dacia. Les Logan, Sandero et Duster, c’est lui. Mais dans un peu plus d’un mois, l’inventeur de la seule gamme low cost réellement couronnée de succès va devoir s’attaquer à un défi que nul autre avant lui n’a réussi. Car non content de distribuer ses Renault discount sur le sous-continent, en Asie du Sud-Est et au Brésil, l’homme et le groupe Renault-Nissan qui lui a confié cette feuille de route, n’excluent pas de les vendre en Europe. Or, le pari est très loin d’être gagné, sur notre vieux continent, comme dans les pays plus pauvres. Un pari si difficile, que Renault a démenti l'information en fin de matinée, expliquant que son homme de confiance est bien chargé de concevoir une petite auto low cost, mais qu'elle devrait être bien plus chère que 2500 euros. Et pour cause. D'autres se sont cassé les dents sur la voiture discount. Sur notre continent, comme sur le sous-continent.

Le bide Tata Nano
On s’en souvient, en 2008 le groupe Tata, géant local de la métallurgie présentait sa révolutionnaire Nano : une voiture dépouillée, de la taille d’une Twingo, vendue 1500 euros. Trois ans et une crise qui a fait flamber le cours des matières premières plus tard, la Nano coûte 2100 euros et c’est un bide. Il s’en vend 4000 par mois, alors que le seuil de rentabilité de l’affaire approche les 20 000 unités mensuelles. Un flop qui n’est pas spécialement lié à sa hausse de prix. Mais à un phénomène sociologique que personne n’avait prévu. C’est que les classes moyennes indiennes ne veulent pas d’une voiture au rabais. Ils sont à la recherche d’un statut social et de l’image valorisante que leur offre la voiture. Exactement les mêmes pratiques que notre classe moyenne à nous. Au temps des trente glorieuses. Aujourd’hui, la voiture a perdu de son crédit par ici, et de nombreux européens n’attachant plus beaucoup d’importance au statut que leur confère leur capot sont friands de low cost. D’où le succès de Dacia.

L’obstacle de l’homologation
La Tata Nano et la future Renault devraient donc cartonner en Europe, plus que dans les pays émergents. Mais c’est sans compter sur les homologations de notre vieux continent. Pour qu’une auto puisse être vendue et immatriculée, elle doit en passer par une batterie de tests, et notamment de crash tests obligatoires. La voiture est projetée contre un obstacle à 64 km/h et les mannequins placés à l’intérieur doivent s’en sortir indemnes. Pour y parvenir, les constructeurs utilisent des structures métalliques à déformation, qui absorbent les chocs. Quant à l’ABS (un système qui évite le blocage des roues en cas de freinage d’urgence), il est obligatoire. Autant d’équipements de sécurité qui font diablement grimper l’addition et Tata s’en est rendu compte. Au salon de Genève du printemps 2009, l’Indien présentait sa version occidentale de la Nano. Tarif  affiché ? 5500 euros. On est très loin des 1500 d’origine. Sur leur stand, les représentants de la marque estimaient alors que leur engin pourrait être commercialisé en 2010 au mieux, en 2011 au pire, le temps de l’homologuer. Nous sommes fin 2011 et n’avons pas vu de Tata venir. La faute à un examen raté devant les inspecteurs du comité européen de sécurité automobile ? Probable. La faute aussi, sans doute, à un tarif qu’il a encore fallu augmenter pour passer correctement les tests. Et le prix butoir en France, pour une voiture neuve, est de 6990 euros. Soit celui d’une Dacia Logan, bien plus grande qu’une Nano.

Les marques chinoises aux aguets
On le voit, l’écueil qui attend la future voiture ultra low cost de Renault-Nissan, si elle existe un jour est double. D’une part elle doit s’attendre à affronter le mépris des classes moyennes émergentes en Inde et ailleurs. D’autre part, elle devra batailler avec les normes d’homologation européennes. A moins que le groupe franco-japonais ait suffisamment de poids pour faire évoluer les réglementations européennes. Des réglementations à usages multiples. Si elles servent aujourd’hui à protéger la vie des conducteurs, elles permettent aussi d’ériger des barrières de protectionnisme qui permettent à nos constructeurs d’éviter la concurrence de marques venues d’ailleurs. De Chine par exemple, dont les autos tentent depuis plus de cinq ans d’obtenir leur certificat d’homologation. Du coup, si les normes s’assouplissent, Renault-Nissan aura réussi son pari. Les constructeurs chinois aussi. Dilemme.


jeudi 17 novembre 2011

PSA : fiabilité faible et garantie minimum expliquent aussi ses soucis


Peugeot 407 : la mal-aimée du classement de fiabilité © Automobiles Peugeot


Philippe Varin s’est voulu rassurant. Ce matin, sur RTL, le PDG de PSA s'est engagé à ce qu’il n’y ait « pas le moindre licenciement économique ». Nicolas Sarkozy a lui aussi tenu à calmer les inquiétudes en déclarant « qu’il n’y aurait pas de plan social ». Les deux hommes doivent d'ailleurs se rencontrer cet après-midi pour discuter d'une première mondiale, un tour de force : supprimer 5000 emplois sans la moindre casse sociale. On peut douter de leur réussite. Mais on ne peut nier les mauvaises affaires de Peugeot-Citroën ces temps-ci. Elles sont certes liées à des choix stratégiques, comme nous l’avons évoqué ici, et à la conjoncture économique européenne comme le patron du constructeur l’a souligné. Mais peut-être que deux raisons beaucoup plus pragmatiques peuvent faire hésiter un acheteur de voiture au moment de choisir l'une des deux marques que dirige Philippe Varin. Deux éléments basiques, mais essentiels : la durée de garantie d’une auto et sa fiabilité. Et l’on s’aperçoit que, dans les deux domaines (étroitement liés), Peugeot et Citroën, comme Renault d’ailleurs, ne sont pas vraiment en tête des constructeurs mondiaux. Et c’est un euphémisme lorsque l’on consulte le classement réalisé chaque année par l’ADAC.  Cet automobile club allemand, fort de 16 millions de membres, est aussi le premier dépanneur en Europe, puisqu’il prend en charge chaque année, 27 millions de voitures en carafe. Chaque panne est dûment répertoriée, d’où des bases de données béton. Et un classement plutôt fiable sur la fiabilité. Au rayon des petites citadines, la première française siglée PSA arrive en 6me position. Pas mal. Sauf qu’il s’agit de la Citroën C1. Une voiture fabriquée en Tchéquie dans une usine détenue en joint-venture avec Toyota. Et c’est, justement, le Japonais, connu pour ses fabrications robustes, qui est aux manettes dans cette unité de production.

Des berlines en queue de peloton
Mais c’est du côté des voitures familiales que l’accident industriel est le plus flagrant. Ces autos, des berlines routières, sont plus chères à l’achat et ce sont précisément elles qui rapportent le plus à leur constructeur. Or, on a beau examiner le tableau, on ne trouve pas trace d’une Peugeot ou d'une Citroën avant la 19me place. C’est la 407 qui affiche ce score, précédant deux Ford et une Opel lanterne rouge. Tout espoir est cependant permis, puisque cette Peugeot est en fin de vie depuis la mise en circulation de la 508 qui ne figure pas encore au classement. 

Service minimum pour la garantie
Reste néanmoins une bonne surprise, c’est la deuxième place de la Peugeot 207, dans la catégorie des petites voitures. Félicitation et longue vie. Mais non. PSA vient d’annoncer qu’elle sera remplacée, dès le printemps prochain, par la 208. 
Devant les résultats de ce classement, on se dit que PSA pourrait se donner les moyens de rassurer les consommateurs au travers de ses garanties, qui mettent l’automobiliste à l’abri des coûts d’une panne pour un temps plus ou moins long. Mais le mot d’ordre tient en deux mots : service minimum. Peugeot et Citroën appliquent la loi et rien qu’elle : les deux ans obligatoires. Alors que les marques japonaises affichent 3 ans depuis quelques années déjà. Alors que les Coréens Hyundai et Kia offrent 5 ou 7 ans selon leurs modèles. Des garanties minimales et des études de fiabilité pas géniales finissent par atteindre l’image des constructeurs concernés, qui, petit à petit, voient leurs parts de marché grignotées. Un marché, certes atone, mais qui n’explique peut-être pas à lui seul les déboires de PSA.

mardi 15 novembre 2011

5000 suppressions d'emploi : PSA paie sa note dégradée et son indépendance trop affirmée


Concept-car Peugeot SXC, le dernier dessiné en France ? © Peugeot
 La douche est plus froide que celle que les syndicats redoutaient avant la tenue du comité d’entreprise de PSA réuni aujourd’hui. Selon la CGT et la CFTC, Peugeot-Citroën devrait supprimer près de 5000 postes dans l’hexagone, sur les 6800 prévus à travers le monde. Outre les fins de missions de nombreux intérimaires et des suppressions de postes chez des sous-traitants, qui pourraient s’élever à près de 2500, l’effectif permanent du groupe, devrait également, et largement, être touché. Toujours selon les délégués syndicaux, 1000 postes disparaîtraient sur les sites de production français et 500 autres dans le seul département de la recherche et du développement du groupe. Enfin, 400 emplois sont également menacés dans d’autres services annexes, comme le marketing.


Philippe Varin a ménagé la surprise

Cet effet de surprise a été ménagé par le PDG de PSA qui vient d’inventer le plan de licenciements à épisodes. Histoire de ménager le suspens et les susceptibilités. Car Philippe Varin a commencé sa campagne d’annonces dès le mois de septembre, en plein salon de Francfort, en Allemagne. Sauf qu’à ce moment-là, dans une interview donnée au Figaro, il se contentait d’évoquer « une réduction de coûts nécessaires pour faire face au ralentissement des ventes ». Sans préciser, évidemment, la nature des réductions en question. Un mois plus tard, nouvelle offensive. Le boss de PSA évoque des suppressions de postes en France, mais elle ne concerneraient que des intérimaires et des départs en retraite non remplacés en 2012. Ce qui rassure Eric Besson. Le ministre de l’industrie, après sa rencontre avec Philippe Varin le 26 octobre dernier, se fend, dans la foulée, d’un communiqué où il confirme que « conformément aux engagements qui avaient été pris en septembre, aucun plan de départs volontaires n'était envisagé à ce jour ». On attend donc sa réaction suite à ce nouvel épisode. Même si l’on connaît le peu d’influence d’un avis ministériel sur la décision de l’entreprise. L’Etat n’est pas actionnaire de PSA, comme elle l’est encore de Renault. De plus, les prêts accordés à la filière automobile après la première crise de 2008 sont aujourd’hui soldés.

Des licenciements pour rassurer les marchés et rester indépendants

Évidemment, tout le monde se demande si ce plan d’économie 2012 de 800 millions d’euros que PSA veut réaliser l’an prochain, est un plan de confort, destiné à rassurer les marchés financiers, ou une réelle nécessité. Les deux en fait. Les fameuses agences de notations scrutent aussi les entreprises et Moody’s a dégradé la note de Peugeot-Citroën il y a quelques mois. La raison invoquée ? Soixante pour cent du chiffre d’affaires du constructeur est réalisé en Europe. Là où, justement, les ventes vont mal. Là où les autos qui s’écoulent sont de petits modèles pas chers, au bénéfice riquiqui. Et les profits de fin d'année devraient être tout aussi petits. Car en Chine, pays qui éponge les dettes des constructeurs mondiaux, PSA est à la traîne. Citroën, l’un des premiers constructeurs présents sur ce marché, a raté son expansion dans l’Empire et s’est fait grignoter ses parts de marchés, embryonnaires dans les années 90, par ses concurrents allemands, japonais et coréens qui ont su exploiter le filon beaucoup mieux que lui au cours des années 2000.
Surtout, PSA est un petit constructeur, avec deux marques généralistes seulement, alors que les groupes puissants, comme Volkswagen, couvrent l’ensemble du marché, du luxe avec Audi (qui se porte au mieux), à la très accessible marque Seat. Et puis, PSA paie aujourd’hui son indépendance. À l’ère ou tous les gros constructeurs mondiaux se regroupent (Fiat et Chrysler est le dernier rapprochement en date), la famille Peugeot (toujours actionnaire à hauteur de 30,3%) a toujours refusé les alliances que plusieurs concurrents lui proposaient, de BMW à Mitsubishi, en passant par Fiat. Certains salariés d’Aulnay Sous Bois, Vélizy et Sochaux risquent de ne pas leur dire merci.

lundi 14 novembre 2011

Loeb est champion du monde faute de combattants


La Citroën championne du monde 2011 © Citroën Sports

On ne voudrait pas gâcher la fête. Celle de Sébastien Loeb couronné champion du monde des rallyes pour la huitième année consécutive, comme celle des médias qui l’ont encensé tout au long du week-end dernier. Mais quand même. Considérer que l’Alsacien est un très grand pilote – ce que nous confirmons pour l’avoir vu survoler du bout du volant quelques arpents d’asphalte – est une chose. Expliquer que pour l’ex-gymnaste, la bataille est chaque année plus rude au moment où il enfile son casque pour grimper dans sa Citroën, en est une autre. Il suffit d’examiner le plateau des autos au début de chaque rallye pour s’en convaincre. Car il n’y a, en tout et pour tout, que deux constructeurs engagés dans le championnat du monde WRC : l’américain Ford et le français Citroën. Avec leurs budgets « usine » les deux constructeurs se battent pour le titre et sont bien les seuls. Sébastien Loeb a donc chaque année une chance sur deux d’être champion du monde. Ce qui est assez rare dans une discipline sportive.

Une chance sur deux d'être sacré champion

Évidemment, des dizaines d’autres voitures sont inscrites et assurent le spectacle derrière les voitures de tête. Mais ce sont des teams privés qui, parfois, ont du mal à joindre les deux bouts. Comme celui de Petter Solberg. Le Norvégien a même failli annuler sa participation au dernier rallye de la saison, celui de Grande-Bretagne, faute de budget. Un rallye qu’il a couru sans beaucoup de sous, sans beaucoup de mécanos, en faisant tout le boulot : celui de coach, de directeur d’écurie et, bien sûr, de pilote. Du bricolage qui lui a néanmoins permis de terminer la saison à la quatrième place du championnat du monde des constructeurs, c’est dire la richesse du plateau engagé. Inutile de préciser que Ford et Citroën sont réciproquement deuxième et premier du championnat en question.

Le rallye ? Dix fois moins cher que la F1. Et dix fois moins médiatisé

Du coup, on se pose la question : pourquoi la très grosse majorité des constructeurs se détourne-elle du rallye ? La discipline est pourtant beaucoup plus spectaculaire que la Formule 1, où celui qui gagne est souvent celui qui fait le plus rapidement son plein d’essence. De plus le WRC (Word Rally Championship) traverse des paysages soufflants et, dans tous les cas, beaucoup plus agréables à regarder à la télé qu’un circuit de Formule 1. Mais la télé, justement, le rallye n’y a pas droit. Pas le dimanche après-midi en tout cas. Tout au plus, voit-on passer quelques brèves images dans nos JT, en cas de victoire de Sébastien Loeb. Ou alors, en forme de résumé, tard dans la soirée. C’est ce qui explique le désamour des constructeurs, qui préfèrent engloutir plus de 300 millions d’euros chaque année dans le grand cirque de la Formule 1. Au lieu d’en consacrer 35 (c’est le budget estimé de Citroën Sport) au rallye. Une opération dix fois moins chère et dix fois moins médiatisée. Sauf lorsque l’on s’obstine, comme les Chevrons. Sauf lorsque l’on est assez malin pour exploiter l’image de son pilote dans toute sa communication. Sauf si l’on parvient à faire croire à tous, que c’est super dur d’être champion du monde. Et que pour y parvenir, il faut se battre contre le monde entier. La rentabilité de cet engagement est tellement énorme, qu’il donne des envies à Volkswagen d’y aller lui aussi. L’Allemand, qui est le deuxième constructeur mondial, pourrait bien s’engager officiellement dans la course, suivi du petit japonais Subaru. Du coup, l’an prochain, si Sébastien Loeb remporte un neuvième titre, celui-ci sera un peu plus mérité.

vendredi 4 novembre 2011

La fin des classes moyennes ? La preuve par l'automobile


La nouvelle Porsche 911 : voiture pour pays émergent ? © Porsche GMBH

Et si les constructeurs misaient sur la fin des classes moyennes dans nos pays riches ? Je sais, vu de loin, ça donne aux premiers une importance socio-politico-économique dont ils n’ont sûrement pas conscience. Mais lorsque l’on compare les phénomènes liés à l’emploi depuis le début de la crise et les bides et succès des autos pendant la même période, on est plutôt frappé de leur concomitance. En examinant l’étude récente de l’Eurofound (fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail), on s’aperçoit que dans les 27 pays de l’Union, les hauts salaires sont de plus en plus nombreux, les petits revenus sont stables et les revenus intermédiaires disparaissent plus que les autres. Une fin des classes moyennes annoncée, donc, ou « une prolétarisation » de celles-ci comme dirait le sociologue Louis Chauvel.

Les ventes de Rolls en hausse de 41,3%

Mais quel rapport avec nos autos ? C’est pareil. Les chères, les luxueuses, les sportives se vendent comme des petits pains. Idem pour les low-cost. Mais c’est du côté des moyennes, les généralistes, les entre-deux eaux que ça coince. Les bonnes vieilles berlines à coffre, les voitures à papa, les Ford Mondeo, les Renault Laguna, les Citroën C5 sont boudées. Même les compactes et les monospaces de ces marques généralistes, au prix moyen, à la taille moyenne et à la puissance moyenne, sont à la peine. A l’inverse de Porsche, où tout va pour le mieux. L’Allemand, qui a publié cette semaine ses scores pour les trois premiers trimestres de cette année, est dans une forme aussi rutilante que ses jantes. Il a augmenté ses ventes de 31% par rapport à la même période en 2010. La crise ? Quelle crise ? Une question qui ne se pose pas non plus à Maranello. Au siège de Ferrari, si le cheval se cabre, la direction se réjouit : elle devrait cette année exploser ses ventes qui devraient atteindre 7000 immatriculations au lieu des 6500 de l’an passé. Quant à Rolls-Royce, la marque du groupe BMW s’offre carrément une hausse de 41,3%. L’ange de sa calandre se pâme.

A l'opposé, Dacia progresse aussi de 51,7%

Et puis, à l’opposé des autos qui naviguent entre 80 000 et 200 000 euros, il y a les low-cost, peu ou prou représentées par une marque unique : Dacia. Un seul chiffre suffit à illustrer la prépondérance de ces autos peu chères : le nombre d’immatriculations du Roumain du groupe Renault en octobre a augmenté de 51,7%, selon le tableau de bord livré chaque mois par le CCFA (comité des constructeurs français d'automobiles). Dacia permet même au Losange généraliste de terminer l’année dans le vert.
Alors, devant ces résultats de l’extrême, les constructeurs réagissent. Et les généralistes s’orientent vers les deux bouts de la chaîne. Surtout PSA, qui étudie le moyen de mettre sur la route un remake de Dacia et d’un autre côté met les bouchées doubles pour occuper le terrain du haut de gamme. Après la DS3, qui est une version luxe de la C3, après la DS4 qui fait de même face à la C4, les Chevrons s’apprêtent à lancer la DS5. Comme si ce creux du moyen était acté. Comme si les classes moyennes n’étaient plus qu’un souvenir. Un souvenir de pays riche. Puisque dans les pays émergents d’il y a peu de temps, et les pauvres pour encore longtemps, il n’y plus que des fortunés et des fauchés.

vendredi 28 octobre 2011

Certaines voitures roulent à droite, d'autres à gauche


Le Peugeot 807 est-il d’extrême droite ? © Automobiles Peugeot



La voiture délivre un message à ceux qui la regardent passer. On s’en est souvenu en découvrant, au hasard de l’un de leur passage télévisé récent, Marine Le Pen installée à bord d’un Peugeot 807 et François Hollande grimper à l’arrière d’un autre monospace, un Renault Espace. On s’est surtout souvenu d’un sondage, réalisé pour le magazine Auto Plus il y a quelques temps déjà, puisque c’était à l’occasion de la présidentielle de 2007. Et nos deux candidats au poste suprême, ou leurs conseillers, ont probablement eu vent de ces chiffres eux aussi. L’enquête de l’hebdo se résumait en une double question fort simple : pour qui votez vous et quelle est la marque de votre voiture ? Bingo : Peugeot arrivait en tête des marques préférées des électeurs du FN, avec un score de 21%. Re-bingo : 38% des électeurs de gauche plébiscitent Renault. Le choix de la marque pour les deux candidats ne doit donc rien au hasard, pas plus que le modèle qu’ils ont élu : un monospace familial pour un candidat « normal » et un modèle similaire pour une candidate encline à prôner une politique familiale et nataliste d’envergure. 

L'UMP aime les allemandes

Pourtant, le socialiste comme la frontiste auraient pu voyager à bord d’un autre monospace, plus petit, moins cher, plus vendu et donc au plus près de leurs électeurs respectifs : le Scenic pour François Hollande et le 5008 pour Marine Le Pen. Mais un postulant au château se doit de prendre de la hauteur et les ors républicains ont leur réplique automobilistique. Des ors que l’ont s’offre hors de nos frontières du côté de l’UMP. Toujours selon cette enquête, les électeurs du parti majoritaire sont les premiers clients des constructeurs étrangers, et en majorité, puisqu’ils sont 54% à bouder les trois marques françaises. Ils sont même 18%, et c’est un record, à privilégier le triptyque du luxe allemand : Audi, BMW et Mercedes. C’est évidemment à la lecture de ce score que l’on mesure l’ampleur de la bévue des communicants de DSK qui l’on laissé prendre place à bord d’une Porsche Panamera, facturée 96 133 euros. Pour le modèle d’entrée de gamme.

Sartre juché sur son bidon

Certes cette enquête date. Mais l’image d’une marque a la vie dure, même si elle est rarement méritée. Celle de Renault, marquée à gauche, remonte aux années où il ne fallait pas désespérer Billancourt, où Jean-Paul Sartre haranguait la foule du haut d’un bidon à la sortie des usines du losange. Celle de Peugeot, est plutôt teintée d’une neutralité stylistique longtemps exercée, et de voiture de père tranquille aussi apolitique que la droite française a pu l’être parfois.

mardi 6 septembre 2011

Saab : General Motors m'a tuer

Saab 900 Turbo 1978-1993
En Suède, c'est "une demande de placement sous protection de la loi sur les faillites". Une demande rejetée d'ailleurs. En France, c'est un dépôt de bilan. Et c'est précisément ce qui vient d'arriver à Saab. Ce dernier acte sans surprise était attendu depuis une semaine. Depuis que la marque avait annoncé des pertes décuplées en l'espace d'un an, passant de 21,9 millions de déficit au premier semestre 2010, à 201,5 million d'euros au bout de la même période de cette année. Comment a t-on pu en arriver-là ? Comment une marque, dont l’image impeccable aurait pu lui assurer une place dans les mythologies modernes et CSP+, peut-elle sombrer dans un coma aussi profond qu’irréversible ?
Un seul modèle
La réponse est, en partie, américaine et le début de la fin remonte à 21 ans déjà. C’est en 1990 que General Motors, alors premier constructeur mondial, s’offre 50% du capital du petit constructeur suédois. Une aubaine : l’image de sportivité, de fiabilité et de luxe janséniste font un tabac auprès des fidèles. Saab, à cette époque, c’est avant tout un modèle : la 900 turbo. Une drôle d’auto, avec une mécanique inusable mais gourmande et un design simplissime. Mais un seul modèle, c’est peu. Il y a bien une 9000, une voiture plus grande, plus insipide, que personne ne voit et que personne n’achète. Le constructeur va mal et le géant américain va se pencher à son chevet. Avec une stratégie toute financière. 
Des voitures puzzle
Peu à peu, les modèles vont évoluer. Un mal nécessaire, mais au lieu de créer de nouvelles autos, les ingénieurs de Tröllhatan, le fief historique de Saab, vont faire leurs courses dans les énormes banques de données du groupe. Car le budget de recherche-développement minimaliste fait loi. Des moteurs ? Des châssis ? Ils vont en trouver chez Opel, en Allemagne, chez Fiat en Italie, ou même chez Cadillac à côté de Detroit. Du coup, les nouvelles 9-3 et 9-5, modèles toujours en vente, sont d’étranges puzzles, constitués de moteurs italiens et de trains roulants allemands. Mais une Saab, c’est plus cher qu’une Fiat ou une Opel. Et les addicts du premier jour ne s’y retrouvent plus. Alors que les nouveaux clients attendus ne se pressent pas non plus. Car les conducteurs d’une Vectra (Opel) ou d’une Chroma (Fiat) n’ont aucune raison de pousser la porte d’un concessionnaire Saab qui a gardé quelques réflexes de condescendance de sa gloire passée. Et puis, pourquoi ce nouveau client s’offrirait-il une auto simplement rebadgée d’un sigle prestigieux, pour 10 000 euros de plus que sa Fiat-Opel ordinaire ?
Le gouvernement suédois n'en veut pas
Les clients s’envolent et les ventes dégringolent. Au point que, quand la bourrasque de 2008 survient, lorsque GM est au bord de la faillite, le petit constructeur du froid est vendu au premier venu. C’est une marque encore plus petite qui le rachète. Tellement petite que Spyker, c’est le nom de l’entreprise hollandaise et acheteuse, n’a vendu l’an passé que 36 voitures. Qu’espérait Victor Muller, le Pdg de Spyker, en investissant (un peu) dans le suédois moribond ? récolter de l’argent public en mettant en avant le sort des 6000 salariés de Saab. Raté : le gouvernement suédois refuse.  Le ministre de l’industrie de l’époque lui réplique que « les électeurs veulent des crèches, des hôpitaux et des policiers. Pas des constructeurs automobiles qui font des pertes. »
10 milliards de dollars dilapidés
Aujourd’hui, le fiasco est presque total. La production de voitures est arrêtée depuis le mois d’avril, et les salaires sont versés grâce à la vente des produits immobiliers. Jusqu’à ce que la dernière parcelle de l’usine de Tröllhattan soit dispersée. Le nombre d’autos écoulées est passé de plus de 120 000 dans les années 90 à 31 000 l’an passé et les recettes ont fondu de manière plus exponentielle encore. Pourtant, GM a réalisé des investissements lorsqu’il était aux affaires : près de 10 milliards de dollars se sont évanouis dans les brumes sudéoises. Selon des économistes locaux, cela correspondrait à une perte sèche de 5000 dollars par Saab vendue depuis vingt ans. Plutôt cher, le design janséniste.

mardi 30 août 2011

Sur M6, le design néo-rétro a bon dos


Joie. Capital s'intéresse à l'auto. A sa manière : le décryptage économique et tendanciel. C'était dimanche soir et c'est ici. Du coup, on s'intéresse et l'on découvre un sujet sur le truc du moment en matière de design bagnolistique : le néo-rétro. On s'attend évidemment à en apprendre de belles sur le phénomène et son succès. Et rien, ou pas grand chose. Juste une spécialiste des tendances qui nous explique que, comme pour les fringues ou la maison, le coup d'oeil dans le rétro rappelle au consommateur le bon temps des trente glorieuses. Un temps sans soucis d'argent. C'est vrai, mais c'est un peu court. Car dans la mode ou la déco, voilà belle lurette que l'on recycle. Pas dans l'automobile. Le design des voitures a toujours, jusqu'à ces temps-ci du moins, innové sans recopier. Aux chromes tous ronds des années 50 et 60, ont succédés les lignes effilées des 70'. Puis vint le temps du bio-design des années 80, avant l'edge design de la fin des années 90 et du début 2000. Pour la première fois, donc, l'auto recycle. Et c'en est fini de l'innovation du crayon.


Le néo-rétro signe la fin de l'auto

En fait, les symptômes de ce non style appliqué à l'automobile sont peut--être plus graves que ce que les journalistes de Capital laissent entendre. Ce recours à la nostalgie ne serait-il pas une manière de séduire les derniers aficionados de la voiture ? Ceux qui se souviennent avec émoi de l'époque de la bagnole reine et ceux, plus rares, qui se raccrochent à un âge d'or qu'ils n'ont pas vécu ? Comme si les constructeurs se désintéressaient d'un avenir qu'ils savent sombre. Et qu'ils savent qu'il se fera peut-être sans eux. la vague néo-rétro et l'auto ressemble à ce revival que nous jouent chaque soir les grandes (et vieilles) chaînes TV qui refourguent le Juste Prix, Sacrée Soirée où Champs Elysées. Car elle savent précisément à qui elles s'adressent : un cœur de cible de quinquas et de sexagénaires qui se souviennent, la larme à l’œil, des grandes soirées de Jean-Pierre Foucault et Michel Drucker. Au fait, l'âge moyen d'un acheteur de voiture neuve en France est de 51 ans. Les jeunes, eux ont tendance à se désintéresser de l'auto. Ils en achètent, en utilisent, mais sans passion. De même que les mêmes jeunes se désintéressent de la télé, leurs préférent d'autres médias, plus 2.0.

Fiat 500, Mini et DS3

Et puis, évidemment, pas de démonstration sans exemples. Pour la Fiat 500 très mise en avant par Capital, aucun doute : on est dans l'illustration parfaite de cette tendance. Même bonne intuition pour la nouvelle Mini, version BMW. En revanche, en mentionnant la DS3 de Citroën, et son succès, Capital est à côté du capot. L'idée du chevron, et de son impeccable designer en chef Jean-Pierre Ploué, n'est pas de refaire la DS du Général De Gaulle, mais de créer une nouvelle marque en la baptisant du nom de son vaisseau des années 50-60. Juste une manière de créer des autos haut de gamme, sur la base de modèles existants. Ainsi la DS3, qui ne ressemble absolument pas à l’ancêtre, est une C3, en plus sportive, plus spectaculaire et, évidemment, plus chère. Même punition pour la toute nouvelle DS4. Une petite erreur sans trop de conséquences. En revanche, faire croire que cette tendance (réelle) néo-rétro n'est pas un chant du cygne, mais un renouvellement de l'industrie automobile, est autrement plus gênant.