mercredi 4 janvier 2012

En 2011, La voiture électrique n'a toujours pas trouvé de prise

La Renault Kangoo ZE électrique © Renault 3D commerce

Tout le monde vante ses qualités routières (réelles), son silence (avéré) son respect de l’environnement (certain) et son économie à la pompe (imbattable). Mais personne n’achète de voiture électrique. Ou presque. L’an passé, en France, seules 2100 autos branchées ont trouvé preneurs. Soit 0,1% des immatriculations de véhicules dans l’hexagone durant la même période. Les optimistes rétorqueront que la France, beau pays de verdure, compterait tout de même plusieurs centaines de fans de la recharge et du silence. Pas vraiment. Car en décortiquant le type d’autos électriques vendues, et c’est rapide, on constate que plus de 20% d’entre elles sont des Blue Car du groupe Bolloré. Plus connues sous le sobriquet d’Autolib’, elles sillonnent les rues parisiennes et sont la propriété de l’entreprise Decaux. Mais toutes les autres ont bien été vendues à des particuliers ? Du tout. Le best-seller de la voiture électrique 2011 se nomme Peugeot Ion. Et non seulement elle n’a du lion que le nom, puisque c’est une Mistubishi I-Miev rebadgée, mais l’un de ses premiers clients, c’est PSA lui-même, qui en équipe plusieurs de ses sites, en une formule d’auto-partage permettant de se rendre d’un point à l’autre de l’usine. Les principales autres Ion immatriculés le sont par des administrations et quelques entreprises. Même sort pour tous les autres modèles disponibles, puisqu’on estime que 95% des véhicules rechargeables sont vendus à des collectivités et des boites privées. Reste, pour les particuliers, une centaine de voitures. C’est peu en un an. Surtout si l’on compare ce chiffre aux 2 millions de voitures « normales » vendues. Et encore, 2011 a été une année de crise pour la filière.

Difficulté de recharge et autonomie limitée

Évidemment, on peut se demander quels sont les réticences des particuliers pour un moyen de transport à priori parfait. D’autant que l’Observatoire Automobile du Cetelem les a interrogé à ce sujet. Et 54% se disent intéressés par ce type d’auto. Mieux, 43% sont même prêts à investir. Quand ? Quand les freins à main des obstacles techniques, logistiques, et financiers seront desserrés. Et visiblement, ce n’est pas pour tout de suite. Car le principal obstacle au basculement du thermique vers l’électrique tient dans l’autonomie limitée des engins. Les 150 kms en moyenne revendiqués par les différents modèles effrayent. La peur de la panne sèche rebute. Surtout que cette moyenne d’autonomie annoncée peut chuter vertigineusement en fonction de la manière de conduire, de la météo et de la circulation. Faux problème ? Peut-être, étant donné la distance de déplacement moyen quotidien des français, légèrement sous la barre des 100 kms. Mais elle s’est allongée de 20% en 10 ans, le prix de l’immobilier obligeant les ménages à s’éloigner de plus en plus des centres névralgiques où ils travaillent. Mais cette peur de la panne sèche est également liée au manque de prises électriques. C’est l’un des paradoxe de la voiture électrique. Pratique en ville en raison des courts trajets que l’on y pratique, elle n’est rechargeable qu’à la campagne. Là ou justement, les distances parcourues sont les plus longues. Il y est facile de brancher son auto devant chez soi ou dans son garage. C’est beaucoup plus compliqué de laisser pendouiller une rallonge depuis son appartement au troisième étage. Évidemment, les collectivités locales et les pouvoirs publics nationaux se penchent sur l’affaire. Depuis quelques jours, un décret oblige même les promoteurs immobiliers à installer des prises dans les parkings des immeubles qu’ils construisent. Même obstacle dans les parkings publics, ou jusqu’au début de cette année, certaines dispositions légales, aujourd’hui levées, leur permettaient de refuser, purement et simplement, l’accès aux véhicules à batteries dans leurs enceintes. Ce manque de prise électrique est d’autant plus problématique, que le temps de recharge complet pour une batterie de voiture est aujourd’hui de plusieurs heures, ce qui exclut le branchement rapide dans une station service équipée. Le syndrome de la charrue apparue bien avant les bœufs continue donc de sévir, et les voitures disponibles bien avant les solutions de chargement contribuent au désamour des conducteurs pour ces autos silencieuses.

Des tarifs prohibitifs

Mais un autre phénomène freine l’expansion de ces modèles. C’est leur prix, pour l’instant totalement prohibitif. Ils coûtent, en moyenne, 25 000 euros, soit près de 50% plus cher que leur cousine de taille moyenne équipée d’un bon vieux moteur à explosion. Et encore, cette somme tient compte de la prime de 5 000 euros accordée par l’Etat qui a donc déboursé plus de 10 millions d’euros l’an passé pour écouler les 2100 autos électriques vendues. Un montant auquel il convient d’ajouter les centaines de millions de subventions accordées aux constructeurs pour développer les modèles et les produire en France. En outre, l’acquisition d’une voiture électrique est, pour l’instant, réservée aux ménages qui ont déjà la chance de posséder une autre auto, thermique, évidemment. C’est que, même au cas, encore exceptionnel, ou les trajets quotidiens sont possibles, pas question de partir en vacances en électrique.

Une contradiction écologique

Autant de raisons qui limitent le succès des voitures électriques. Reste que les chercheurs cherchent, les batteries deviennent de plus en plus performantes, se rechargent de plus en plus vite et les prises de courant vont se multiplier dans les prochaines années. Mais lorsque voitures et infrastructures seront réellement au point, se posera un autre problème, au moins aussi épineux : la consommation électrique. 36 millions de voitures environ circulent en France. Selon l’Ademe (agence de l’environnement et de la maîtrise des énergies), une petite électrique consomme 25 KWh pour 100 kms. En multipliant ce chiffre par le nombre de kilomètres effectués par an, et le nombre d’autos en circulation, certaines associations écologistes n’hésitent pas à estimer la surproduction d’électricité nécessaire à l’équivalent de 10 à 15 nouveaux réacteurs nucléaires, lorsque l’ensemble du parc automobile aura basculé vers le tout électrique. Une évolution, ou une impasse, intéressante à l’heure du débat sur une sortie éventuelle du nucléaire.

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