DS5 : le nouveau fleuron des chevrons © Citroën |
C’est un grand classique. A chaque fois qu’une auto française grande et chère apparaît sur le marché, les journalistes spécialisés se lâchent. Du moins s’imaginent t-ils, avec l’aide des services marketing des constructeurs, que la recette allemande va fonctionner. Une recette à priori simple, qui consiste à fabriquer et à vendre de grosses berlines à grosses marges bénéficiaires partout sur la planète. C’est facile, c’est bon pour le pays, ses emplois et ses excédents commerciaux disparus. Pour le baptême de la nouvelle Citroën DS5 qui débarque ces jours-ci, nos confrères ont une fois de plus pris le chemin de la dithyrambe. L’émanation web de l’émission Turbo de M6) l’a carrément rebaptisée « tueuse d’allemandes ». Quant à la Tribune, elle attribue de sacrés lauriers aux chevrons, en écrivant que « jamais depuis très, très longtemps, un modèle tricolore n'avait été aussi abouti. » Tremblez BMW, Mercedes, Audi, vos jours sont comptés.
Goldorak aux manettes du design
Goldorak aux manettes du design
Le patriotisme journalistique n’est pas le pire des défauts, encore se doit-il de reposer sur quelques données solides. Et il suffit de faire le tour des 4,53m de la DS5 pour constater qu’elle ne joue pas vraiment dans la même catégorie que les BMW Série 3, Audi A4 et Mercedes Classe C, ses très directes concurrentes. Une différence qui ne se situe pas dans le domaine de la qualité des matériaux utilisés, ni dans les assemblages de ces derniers, très honorables. Pas plus que dans ses performances mécaniques, juste dans la moyenne. La différence est ailleurs. Dans des domaines aussi subjectifs que décisifs. La DS5 est une Citroën. Avec l’image que se coltine la marque. Celle d’un constructeur chargé d’histoire, d’innovation et d’exotisme. Et la DS5 s’inscrit parfaitement dans cette saga. Son style extérieur comme intérieur est aussi complexe que baroque, comme si Goldorak lui-même avait pris les commandes du bureau de style des chevrons. Or, ce baroque, totalement revendiqué d’ailleurs, est de nature à faire perdre à cette auto plusieurs points sur un marché on ne peut plus sage. Il suffit d’examiner les lignes du trio gagnant et germanique. C’est qu’à 40 000 euros le modèle, les clients sont ultra-conservateurs et semblent encore et toujours vouloir s’offrir du statut social. Et un design de notaire. Rien de plus adapté dans ce domaine qu’une berline allemande.
De petites fantaisistes et de grandes assagies
On pourra nous répliquer que Citroën a parfaitement réussi son entrée dans le domaine du haut de gamme avec la DS3, sa petite luxueuse. Et que la marque entend bien surfer sur ce succès avec cette DS5. Sauf que le public très particulier des autos dites « premium », s’il s’autorise parfois des fantaisies, ne fait des écarts que pour sa seconde auto, ou pour celle de madame, c’est dire si ce marché est conservateur. BMW l’a parfaitement compris, avec sa gamme Mini. Comme Audi avec sa petite A1. Même Fiat, avec la minuscule 500, arrive à se frayer un marché dans cette catégorie ultra-disputée.
Un toucher de route décevant
Évidemment, on espère se tromper et on ne peut que le souhaiter. On peut se dire aussi que Citroën, fidèle a sa réputation peut compter sur le châssis de son nouveau modèle pour enfoncer la concurrence. La marque est en effet le spécialiste mondial de ce que les ingénieurs maison appellent poétiquement le « toucher de route ». Sauf que dans le cas de la DS5, le compte n’y est pas. Pour des raisons probablement liées à des économies d’échelle, la suspension oléopneumatique est abandonnée au profit de trains roulants lambda. Et l’ensemble est d’une fermeté toute germanique. Ce qui, du coup, place l’auto au niveau de ces concurrentes. En leur empruntant leurs rares défauts.
Citroën a voulu prolonger la parenthèse de bonheur dessinée par la DS3... Comment ? En poursuivant la tendance sociologique du moment : personnaliser sa voiture dans l'espoir (vain ?) de se démarquer des autres (automobilistes et bipèdes...). Hélas, même Madame n'aurait pas forcément envie d'écoper de la DS5. Pourquoi ? Parce que cette déesse ne tient pas ses promesses : passé le premier émoi (assez similaire au coup de foudre pour un amant), les degrés celsius tropicaux générés par ses atours baroques dégringolent au bout d'une demi journée passée avec/en elle... C'est vraiment dommage. Depuis la dernière version de la C5, je trouve que Citroën a fait un bond de géant. Et puis, les efforts de la marque aux chevrons me touchent... J'ai interviewé Olivier Daillance, le responsable "Studio Couleurs et Matières" de la star DS5 et ce dernier a mis tout son génie dans ce projet fou et osé.... Je croise les doigts pour le haut de gamme Français...
RépondreSupprimerMerci pour votre blog Michel. Il est excellent ! Belle écriture !
Charlotteauvolant